Sur ma route.. & Il était une fois..
L'Hôtel des postes accueille en septembre dans la salle d'exposition de l'Hôtel des postes, l'exposition collective "Sur ma route" de Chantal Rose et 'Il était une fois' de Véronique Ermacora.
Les artistes
Chantal ROSE
Artiste peintre
“Originaire de la Drôme, issue d'un milieu modeste, très éloigné du monde des Arts, je n'ose parler de mon désir de me diriger vers les Beaux Arts. Bien que ma sensibilité s'exprime dans les dessins réalisés en option Arts plastique au lycée, je choisis un DEUG de sciences à la faculté de Grenoble. Je passe ensuite le concours de l’École Normale, le réussis et prépare pendant trois ans un DEUG d'enseignement à Valence.
Mon désir de vivre dans un autre univers, de créer, d'accéder à la maîtrise des techniques picturales m'amène à participer à un stage d'aquarelle dans le Tarn et Garonne chez Claude Nicaud : un artiste parisien installé dans le magnifique village de Saint-Antonin Noble Val. Et alors que ma carrière d'enseignante commence à peine, je tente de modifier ma trajectoire et fais le choix d'une année de disponibilité. Une année de bonheur intense durant laquelle je travaille avec lui et pour lui. Je procède au tirage et à la mise en couleur de ses gravures, j'apprends à travailler sur presse, je dessine, je peins, je m'imprègne de ce monde nouveau pour moi. Nous partons très souvent peindre en extérieur dans les Causses, tels les impressionnistes et il faut aller vite pour capter la lumière. Cela façonnera mon geste je crois...
J'apprends également l'encadrement auprès de Monique Nicaud.
Lorsque je reprends ma route vers la Drôme, ma vieille 204 est remplie de tableaux, et j'expose pour la première fois dans mon village natal au château d'Hauterives. Hauterives, connu pour l’œuvre du facteur Cheval «le Palais Idéal».
Mon exposition est un vrai succès .
Cette année 1982 est un véritable déclencheur et pourtant, par manque de confiance je n'arrive pas à me lancer pleinement dans cette vie d'artiste, je reprends le chemin de l'école.
Difficile de concilier création et enseignement : mes congés maternité sont mes rares moments de créations. Mon exposition suivante a lieu à la naissance de ma seconde fille en 1990. Je participe à quelques concours et le Crédit Agricole me propose d'illustrer ses chéquiers avec les paysages drômois. Je refuse l'offre. Syndrôme de l'imposteur quand tu nous tiens !
“En 1995, installée à La Réunion depuis trois ans, je tente de passer le concours afin d'enseigner les Arts Appliqués. Je le prépare seule et suis surprise d'obtenir la première partie du concours. Le rectorat m'annonce que je peux rejoindre une formation pour préparer la suite . En à peine deux mois, je dois intégrer des notions d'architecture, de design d'objet et de mode, de communication visuelle. Je me lance à fond et obtiens ce concours à Paris devant un jury qui me lance «Ah, une autodidacte !»
En 1997, nous partons en Guadeloupe avec mon conjoint qui veut changer d'horizon mais je ne demande pas de poste en arts appliqués.
Encore peu sûre de moi, je reprends un an de disponibilité : nouvelle période de création où j'utilise essentiellement les craies de couleur. Puis je reviens à La Réunion, mon pays de cœur, où j'enseigne les Arts Appliqués au lycée Boisjoly Potier jusqu'en mars 2017. J'organise des ateliers ou des interventions avec des artistes comme Claire Gaboriau, Jace et Eric Raban. Je fais la rencontre de Pierre Baille, décorateur de théâtre auprès de qui j'apprends beaucoup et réalise avec mes élèves et mes collègues motivés des décors, des dessins de costume et des affiches pour des comédies musicales montées au sein du lycée.
Je participe hors cadre scolaire à diverses expositions comme «Les peintres en plein air» à Saint-Pierre.
J'ai la chance de partir à la retraite à 57 ans et cela m'offre le temps de reprendre à mes pinceaux et de me perfectionner sur les techniques du fusain, de l'acrylique et du pastel sec. Je m'inscris à l'atelier de Jean-Jacques Houée en 2017/2018 au village de l’Éperon. C'est grâce à lui que ma peinture évolue. Ses conseils, son regard, m'apportent beaucoup lorsque je commence à travailler l'acrylique.”
Mes expositions :
- 1982 au château d'Hauterives (Drôme)
- 1990 Hauterives
- Mars 2019 à la médiathèque de l'Université du Tampon, une série d’œuvres mettant en valeur les femmes de l'Océan Indien
- Septembre 2019 à la salle Beaudemoulin au Tampon (exposition collective)
- Mars 2021 exposition collective avec Hang'art «O Bleu»
- Février/Mars 2023 exposition collective avec Hang'art «Où suis-je?»
Mes projets s’arrêtent là car je dois me faire opérer en urgence d’une lésion cérébrale alors que je suis en métropole et depuis je mène un autre combat.
VIVRE , et guérir...
- Je participe en février 2024 à l’expo collective ANSANM à Hang’art à Saint-Pierre où je présente 6 portraits au fusain (marouflés sur châssis toile)
Démarche artistique
“Installée depuis 1992 à La Réunion, mes créations se nourrissent de la richesse naturelle, culturelle et ethnique qu'offre l'île intense et sa situation au cœur de l'Océan Indien.
Dans cette exposition que j'ai intitulée «SUR MA ROUTE...», je présente des personnages réalisés au fusain que je travaille après avoir marouflé mon papier sur un châssis entoilé. Il est fixé ensuite avec un produit anti UV qui me permet de présenter mes travaux sans la nécessité d'une vitre.
Ce sont mes rencontres en voyage, des scènes de vie, des regards croisés, voilés ou curieux, qui m’inspirent et me permettent de faire vivre ces personnages et de m'en souvenir. Je ne peux nier l'influence d'Emmanuel Michel que je découvre lors d'une exposition au château d'Hauterives (lieu de ma première exposition, coïncidence ?) en 2013. Cet artiste me séduit par ses magnifiques carnets de voyage et ses toiles où les personnages rencontrés au gré de ses périples prennent vie. Comme lui mon travail s'articule autour de mes rencontres. Lors de mes voyages au Vietnam, en Thaïlande, en Inde, au Népal, et surtout à Madagascar, ce sont les gens qui m'intéressent : leur vie, leurs regards, leur environnement.
Je ne transcris que rarement l'abstraction ou alors ce sont des réalisations destinées à jouer avec des idées, des techniques. Mon travail s'ancre dans la réalité des personnes modestes qui travaillent, qui se démènent pour vivre, qui se battent pour survivre qu'ils soient tristes ou heureux.
J'ai choisi le fusain car le geste est simple et libre. Le trait s'efface, marque ou s'estompe. Le choix du cadrage est important. Mes personnages sont toujours en assez gros plan, jamais représentés en pied pour que le hors-champ permette au spectateur de pénétrer leur espace. Ils ont tous un objet ou sont en action : prière, danse, pêche ou jeu, cependant dans mes réalisations ils s'arrêtent, nous regardent comme dans un instant figé.
J'aime travailler à partir de mes photos. J'aime travailler vite. Il y a parfois une certaine violence dans le geste par laquelle j'essaie de faire ressentir cette énergie qui bouillonne en moi.
En plus de cette série de portraits au fusain, l'exposition présente aussi d'autres scènes de vie cette fois-ci en couleurs inspirées de mes voyages et une petite série de paysages à l'acrylique que j'ai réalisée sur le cirque de Mafate. Des tableaux qui devaient trouver leur place au gîte Bois de couleur chez M. Bègue à Marla mais qui s'exposent aujourd'hui ici du fait de la difficulté de les transporter jusque dans le cirque. D'autres paysages complètent cette exposition, tous décrivant notre magnifique île de La Réunion. Une île qui continue de me charmer par toutes ses lumières: douces et si violentes parfois...”
Véronique ERMACORA
Artiste peintre
Pourquoi peindre? ça ne sert à rien un tableau, c'est futile, c'est du luxe...
“Je suis née en 1963, dans un milieu trés modeste du Pas-de Calais. Mes grands-parents italiens et polonais ont fui la misère dans les années 30. Mon père, employé à la briqueterie de Rouvroy depuis l'âge de 14 ans et ma mère, femme au foyer, diplômée de l'école ménagère, avaient pour ambition d'offrir à leurs 2 filles, des études, garantie d'un meilleur avenir.
A cette époque, Enrico Macias chantait que les gens du Nord avaient dans les yeux le bleu qu'ils n'ont pas dehors: mes yeux sont bleus mais cela n'a pas suffit à contrer la grisaille emplie de tristesse d'un climat souvent morose. J'en étais pétrie et j'en ai gardé en moi un fond de brouillard.
A 20 ans, j'avais développé une sensibilité à la souffrance des autres et à prendre soin d'eux. Mon diplôme d’ergothérapeute m'a menée en Moselle, d'abord furtivement dans un centre de rééducation puis pendant 19 ans dans un service hospitalier psychiatrique.
Le dessin, la peinture étaient déjà dans ma vie, c'était mon jardin secret, une respiration quand la vie devenait trop lourde. J'ai proposé ces outils à des personnes ayant de très graves troubles de la personnalité et que les actes de violence avaient mené dans ce service hospitalier fermé. Cela leur a permis d'exprimer, de donner à voir ce qui n'était pas visible. En 3 ans de formation, je suis devenue art-thérapeute, alliant ainsi mon attrait pour l'expression artistique et le soin.
Mariée, mère de deux enfants, sans aucun doute mes plus belles créations, c'est en famille que je suis venue m'installer sur l'île de La Réunion. Aujourd'hui j'ai 61 ans, mes enfants vivent en métropole, je travaille dans un service hospitalier de gériatrie du Tampon et la peinture est toujours mon jardin secret.
Mon parcours est celui d'une autodidacte, étayée cependant par différentes expériences qui ont enrichi ma pratique au fil du temps.
J'ai été membre de l'atelier d'arts graphiques du musée de Sarreguemines. C'est là que j'ai développé ma palette technique en y ajoutant le pastel, le fusain, le crayon, les encres, la technique du lavis et du croquis sur modèle vivant.
Un stage réalisé en Alsace de peinture traditionnelle sur bois, m'a permis de peindre des meubles.
Pendant 10 ans j'ai réalisé des aquarelles pour un publicitaire indépendant, améliorant ainsi mes fins de mois.
Dans les années 80 lors d'un concours , la caisse d'épargne de la ville de Sarreguemines m'a attribué le 1er prix d'art graphique pour un lavis intitulé "il pleut sur Beausoleil", Beausoleil étant un quartier de cette ville.
A La Réunion, j'ai fait partie de l'atelier de l'artiste peintre Jean Jacques Houé pendant un an.
J'ai exposé 3 toiles à la salle Beaudemoulin du Tampon lors d'une exposition collective et j'ai participé par deux fois aux "peintres en plein air de Saint-Pierre".
En 2013 le prix d'encouragement du concours Céliméne m'a été remis pour une peinture acrylique sur toile intitulé “il y a des trous sous mon chapeau", hommage aux patients malades Alzheimer que j'accompagnais dans mon travail.
D'où vient cette envie de peindre?
"J'ai 6 ans, j'entre dans le salon, ça sent le feu de bois, et là, stupeur. Quelqu'un a osé peindre directement sur tout le mur de plâtre blanc, un poussin gigantesque portant sur son dos des œufs décorés de motifs colorés. C'est Pâques.
effrayée par la " grosse bêtise " faite par mon oncle et émerveillée de tant de beauté, j'ai des papillons dans le ventre"
Depuis, peindre restera pour moi un espace de liberté, de transgression et une histoire à raconter.
Je ne cherche pas le trait juste ;
Je ne cherche pas à faire un beau tableau ;
Je cherche à exprimer ce que je ressens du monde qui m'entoure, à extraire ces moments pépites que la vie m'offre et à côté desquels il me serait si facile de passer, si je n'étais attentive.
Comme le sculpteur libère le cheval qui était prisonnier dans la pierre, avec mes crayons et mes pinceaux je laisse la toile et la couleur libérer cette énergie qui me fait sentir vivante.
La plupart du temps, j'utilise les photos que je prends de ce qui m'a touchée, émue. Je les garde pour le moment où je ressentirai la nécessité de les peindre. C'est un cheminement intérieur, parfois difficile et toujours compliqué. Je ne sais jamais comment cela va se terminer. Combien de toiles en cours d’exécution sont passées sous la douche et combien sont restées en suspend, pas abandonnées, juste en attente...Je ne suis pas de ceux qui peignent tous les jours, qui font et refont la même toile plusieurs fois. Mes gestes sont vifs, comme si il y avait une urgence. La peinture acrylique permet ce travail de spontanéité, de rapidité, de repentir aussi. Je cherche les ambiances, les lumières sont accentuées par des couleurs vibrantes, les empâtements déposés par le couteau donnent une dimension tactile au tableau. Ma peinture pourrait être qualifiée d’expressionniste, avec une palette aux couleurs réalistes quelque peu idéalisées.
Ils sont nombreux ceux qui m'inspirent, Edward Hopper, pour ses lumières contrastées et l'émotion qui transpire, notamment sa représentation de la solitude, Toffoli pour ses couleurs vibrantes et l'épuration de ses dessins, les chats croqués sur le vif d'Alexandre-Theophile Steinlen, Paul Cézanne pour l'audace de ses couleurs...
Derrière chaque tableau se cache une histoire, ne vous arrêtez pas au sujet représenté, cherchez l'histoire qui résonne en vous et écoutez là.”